Cour d’appel de Paris, 27 septembre 2023, n°21/12348
Un sculpteur a assigné en contrefaçon de ses droits d’auteur un architecte d’intérieur et sa société, au regard des usages réalisés de sa création, la lampe « Lyre ».
L’architecte avait commandé au sculpteur plusieurs modèles de cette lampe pour décorer un hôtel situé en Suisse. Le sculpteur lui reprochait d’avoir diffusé sur les réseaux sociaux, des photographies de cette lampe sans son autorisation, ni mention de son nom.
Les débats ont porté sur l’originalité de la lampe qui était caractérisée comme suit :
« L’association d’une structure arrondie en forme de harpe asymétrique, véritable sculpture fabriquée en plâtre puis laquée et peinte en différentes couleurs selon le modèle, coiffée par de petits abat-jours de forme et de matériaux traditionnels ».
L’auteur expose qu’il « a fabriqué la lampe Lyre afin de lui donner une allure souple, aérienne et sensuelle du fait de sa forme arrondie et qu’elle fasse ‘tour à tour penser à une amphore, une algue mouvante, des jambes déliées ou un poisson plongeant et dynamique par son asymétrie’, la lampe incarnant, de ce fait, tout à la fois le mouvement et la sérénité ».
➡ La Cour admet que la création est protégée :
▶ Le créateur définit de façon circonstanciée les contours de l’originalité qu’il allègue en explicitant clairement les choix auxquels il a procédé dans sa démarche de création.
▶ Il est parvenu à concilier les contraintes techniques propres à une lampe avec une représentation toute personnelle de l’instrument de musique donnant à l’ensemble des courbes sensuelles et généreuses.
Quant aux actes de contrefaçon, la défenderesse se prévalait de la théorie jurisprudentielle de l’accessoire, aux termes de laquelle une œuvre peut être licitement exploitée si elle figure en arrière-plan et n’est pas présentée en tant que sujet principal (Cass. 15 mars 2005, n°03/14820 ; Cass. 12 mai 2011, n°08/20651).
Elle soutenait que la lampe est représentée accessoirement en ce qu’elle n’est ni l’objet, ni l’objectif de la communication en cause et qu’en toute hypothèse, elle n’est pas la lampe initiale telle que fabriquée par le sculpteur mais une adaptation qui avait été réalisée à la demande de l’architecte.
➡ La Cour ne suit pas cette position et condamne les actes de contrefaçon :
▶ La présence de la lampe sur les photographies litigieuses résulte d’un choix délibéré dès lors que le mannequin se met en scène avec elle : si cette lampe est parfois reléguée au 2d plan, elle reste très visible dans toutes ses caractéristiques et mise en évidence au regard des lumières et des couleurs.
▶ Les adaptations réalisées de la lampe ne confèrent pas de droits à l’architecte, ni même ne l’autorisent à publier des photographies sans mention du nom de l’auteur.
▶ Ces atteintes sont renforcées car les photographies laissent penser que l’architecte est le créateur de la lampe Lyre – les juges relèvent que l’architecte et le sculpteur sont tous deux très connus dans leur secteur d’activité respectif.