Protection par le droit d’auteur des fauteuils ALPHA (oui) / Contrefaçon (oui)

Tribunal judiciaire de Paris, 14 mars 2024, 22/15098

Les ayants-droits sur le fauteuil de design dénommé ALPHA assignent la société The Frankie Shop en contrefaçon de leurs droits d’auteur à la suite de l’exposition dans une boutique parisienne de deux fauteuils semblables et de la publication de photos sur Instagram.

L’originalité du fauteuil est discutée au motif que la description faite ne serait qu’objective sans caractériser les choix créatifs entrepris par l’auteur.

Le tribunal admet que le fauteuil est original et éligible à la protection par le droit d’auteur :

➡ L’assemblage de plusieurs éléments d’apparence arrondie, sans aucun élément de forme raide ou abrupte, « donne une impression visuelle de moelleux et de douceur ».

➡ La structure du fauteuil, avec un pied de faible hauteur, « qui est plus petit que l’assise et qui n’est donc plus visible lorsque le fauteuil est installé, donne l’illusion que le fauteuil flotte au-dessus du sol sur lequel il repose, qu’il est léger ».

➡ « La combinaison de l’ensemble de ces éléments donne un esthétisme particulier au fauteuil ALPHA, qui atteste d’un réel effort créatif de la part du créateur ».

➡ « Ce fauteuil, à la simplicité apparente, porte l’empreinte de la personnalité de son auteur, ce que souligne par ailleurs la valeur reconnue aux œuvres de celui-ci dans plusieurs expositions et ventes aux enchères, auprès de professionnels du secteur de l’art ».

La contrefaçon est retenue car les fauteuils incriminés sont de forme arrondie et présentent des coutures rayonnant à partir du même point placé au centre de la pièce pour s’éloigner symétriquement vers l’extérieur et en suivant l’assise jusqu’au sol. Au surplus, les fauteuils sont recouverts d’un tissu de même couleur et de même apparence.

🔔 L’œil de BA : Intéressant de noter que le tribunal se réfère à l’arrêt Cofemel sur un point discuté : « La protection d’une œuvre en tant que dessin et modèle n’est nullement un frein à sa protection sur le fondement du droit d’auteur, pourvu que les conditions de cette protection soient remplies. En effet, comme le rappelle la CJUE, la protection réservée aux dessins et modèles et celle assurée par le droit d’auteur ne sont pas exclusives l’une de l’autre (CJUE, 12 septembre 2019, C-683/17, Cofemel c. G-Star Raw, pt. 43) ».