Matinée APRAM x MEDEF – Les mains dans le contrat! Le juriste au pied du mur

Le vendredi 30 juin 2017, avait lieu la matinée de travail annuelle de l’APRAM en collaboration avec le MEDEF, présidée par Me. Sylvie Benoliel-Claux et axée sur la réforme du droit des contrats, issue de l’ordonnance du 10 février 2016, entrée en vigueur le 1er octobre 2016.

Cette matinée s’inscrivait dans le prolongement de la réunion déjà organisée par la Commission « Marques Françaises » de l’Association, en 2016. Elle a réuni plus de 250 professionnels, indice révélateur de l’intérêt et de la grande actualité du sujet.

Elle avait essentiellement pour objet de dégager les nouveautés introduites par la réforme, de revenir sur les codifications de la jurisprudence antérieure et d’éclairer les praticiens spécialistes en droit de la Propriété intellectuelle sur ce qu’il fallait en retenir pour les contrats de demain. Toutes les professions du droit étaient représentées grâce à la présence d’un Magistrat, d’un Professeur de Droit, d’un Juriste d’entreprise, d’un Conseil en propriété industrielle et d’un Avocat.

M. François Ancel, Président de la 2ème section de la 3ème chambre du TGI de Paris ouvrit la séance. Fort de son expérience de 10 ans à la Chancellerie, M. Ancel est intervenu sur l’esprit de la réforme du droit des contrats et, plus particulièrement, sur le caractère supplétif du droit commun des contrats, malgré la prééminence affichée du droit spécial. M. Ancel est coauteur d’un ouvrage sur la réforme qui retrace ses origines, ses atermoiements et son aboutissement [Aux sources de la réforme du droit des contrats par F. Ancel, B. Fauvarque-Cosson, J. Gest – Dalloz 2017].

M. le Professeur Pierre-Yves Gautier s’est ensuite intéressé à la question de savoir si la pratique du rédacteur de contrat est susceptible de changer à l’aune de la réforme et il est notamment revenu sur la codification de l’obligation de bonne foi et de la prohibition des engagements perpétuels en examinant, sur ce dernier point, la portée de l’arrêt de la Cour de cassation du 8 février 2017 (Christian Lacroix). L’introduction, dans l’ordonnance, de la théorie de l’imprévision a en outre fait l’objet d’une réflexion approfondie. M. Gautier est l’auteur, notamment, du livre Propriété littéraire et artistique (10ème édition), à jour de la réforme du droit des contrats [Propriété littéraire et artistique par P-Y. Gautier – Collection Droit Fondamental – PUF 2017].

Ces deux premières interventions, abordant la réforme dans son ensemble, ont été suivies par des présentations dédiées à des points spécifiques, susceptibles de présenter des implications directes en droit de la Propriété intellectuelle.

Mme Anne-Sophie Frère-Barcelonne, de la direction juridique de la société ENGIE, a éclairé l’assemblée sur l’importance du préambule du contrat, au regard de la nouvelle obligation légale d’informer de l’article 1112-1 nouv. C. Civ. Il a été rappelé que le devoir d’informer ne dispense pas de l’obligation de se renseigner. Le rédacteur devra souvent travailler au cas par cas et en fonction de ce que le cocontractant demande et de ce qu’il comprend de sa propre obligation de s’informer, selon sa fonction et ses compétences. L’enjeu consiste à tracer les contours de l’information, des expériences et des compétences respectives des parties, de détailler les mobiles et objectifs, en d’autres termes de comprendre l’étendue de l’information. Cet exercice rédactionnel détient un rôle central dans la prévention du contentieux.

Enfin, Isabelle Hegedus, CPI au sein du Cabinet Germain & Moreau et Nicolas Moreau, avocat associé du Cabinet Brunswick ont bouclé la matinée par un sujet technique et prospectif relatif à la nullité du contrat, ses conséquences et les restitutions à prévoir, avec l’ambition d’examiner la question dans le cadre des contrats de cessions de droits de propriété intellectuelle, de concessions de licence ou d’opérations plus complexes. Un nouveau chapitre du Code civil (livre III, titre IV, chapitre V – art. 1352 à 1352-9) est dédié aux restitutions.

Au cours de la matinée, une question portant sur le droit transitoire a été soulevée : dans quelle mesure le Juge sera-t-il tenté d’interpréter le contentieux soumis au droit ancien à la lumière de la loi nouvelle ? Selon M. Ancel, si l’ordonnance vient seulement consolider la jurisprudence antérieure, le Juge sera susceptible de continuer à l’appliquer tout en étant conforté par la rédaction du nouveau texte ; dans le cas où les nouvelles dispositions se démarquent de la jurisprudence antérieure, la Cour de cassation pourrait anticiper le revirement de jurisprudence qu’elle serait amenée à effectuer, de toute façon, un peu plus tard.

Les praticiens sont plus que jamais soumis à l’exigence d’une formation continue, ce d’autant plus qu’un avant-projet de réforme de la responsabilité civile est à venir.

Pour les membres de l’APRAM, les présentations des intervenants sont accessibles en ligne, sur le site de l’Association.