Cour d’appel de Paris, 7 mai 2025, RG n°23/12877
HACHETTE FILIPACCHI PRESSE, titulaire des marques semi-figuratives « ELLE », forme opposition à l’encontre de la marque verbale « CCI ELLES », déposée par la CCI France, estimant qu’il existe un risque de confusion ainsi qu’une atteinte à la renommée de l’une de ses marques, not. pour l’organisation de conférences, forums ou colloques.
Elle n’obtient satisfaction ni devant l’INPI, ni devant la Cour d’appel.
𝐒𝐮𝐫 𝐥𝐞 𝐫𝐢𝐬𝐪𝐮𝐞 𝐝𝐞 𝐜𝐨𝐧𝐟𝐮𝐬𝐢𝐨𝐧
➡️ Le seul fait que deux signes partagent un élément verbal commun – en l’occurrence ELLE / ELLES – ne suffit pas à caractériser une similitude. Encore faut-il établir que cet élément est soit dominant dans l’impression d’ensemble, soit doté d’une position distinctive autonome.
➡️ Les signes renvoient tous deux à l’univers féminin, mais ils sont perçus différemment par le public pertinent. Le terme ELLE évoque une représentation générale et abstraite de la femme, tandis que le terme ELLES, dans le signe incriminé, désigne un public féminin ciblé, en lien avec les missions de la CCI.
➡️ La Cour souligne par ailleurs que l’élément CCI, placé en attaque, est intrinsèquement distinctif au regard des services visés et immédiatement identifié comme désignant une institution publique.
➡️ Surtout, l’élément ELLES ne présente aucune position distinctive autonome au sein du signe contesté. Il ne se détache ni conceptuellement, ni visuellement du sigle CCI avec lequel il forme un ensemble cohérent et significatif. Le public ne percevra pas ce signe comme une déclinaison de la marque ELLE, même si cette dernière bénéficie d’une forte notoriété dans le secteur de la presse.
𝐒𝐮𝐫 𝐥’𝐚𝐭𝐭𝐞𝐢𝐧𝐭𝐞 𝐚̀ 𝐥𝐚 𝐫𝐞𝐧𝐨𝐦𝐦𝐞́𝐞
➡️ La renommée de la marque ELLE est reconnue pour les magazines et certains services publicitaires mais elle ne s’étend pas aux services liés à l’organisation d’événements ou conférences.
➡️ Même en présence de services similaires, le signe CCI ELLES ne crée aucun lien dans l’esprit du public avec la marque ELLE, compte tenu des différences d’ensemble visuelles, phonétiques et conceptuelles identifiées entre les signes.
La Cour d’appel écarte également le grief d’atteinte à la renommée.
Œ𝐢𝐥 𝐝𝐞 𝐁𝐀 : Cette décision n’est pas définitive et un pourvoi peut encore intervenir.
Rappelons qu’un arrêt récent de la Cour de cassation du 5 juin 2024 avait déjà exclu l’atteinte à la marque de renommée (ELLE / JAMAIS SANS ELLE – lien en commentaire).
Sur la forme, la CA rappelle un point de procédure : le recours à l’encontre d’une décision de l’INPI statuant sur l’opposition à l’enregistrement d’une marque n’est pas un recours en réformation, mais un recours en annulation, dépourvu d’effet dévolutif.
La CA ne peut donc que ‘rejeter’ le recours ou ‘annuler’ la décision. Elle ne peut pas ‘confirmer’ cette décision, ni davantage se substituer à l’INPI en ‘statuant à nouveau’, que ce soit pour faire droit à l’opposition ou, à l’inverse, pour enregistrer la marque.