Marques déposées par un distributeur en France / Dépôts en fraude des droits de son fournisseur étranger (oui)

Tribunal judiciaire de Paris, 25 octobre 2024, n°20/07661

A partir de 2002, la société NDE a distribué en France un détergent sous les marques « BAGUI » et « SHUMANIT », fabriqué par la société de droit israélien BAGI.

A cette occasion, NDE avait déposé ces deux marques en France, tandis que la société BAGI avait protégé ces mêmes signes en Israël et par des marques internationales désignant la France.

En 2020, la société BAGI a choisi de distribuer ses produits en France par l’intermédiaire de la société ELDAI. La société NDE a alors assigné ce distributeur en contrefaçon et concurrence déloyale, sur le fondement de ses marques françaises de 2002.

Assignée en intervention forcée, la société BAGI a reconventionnellement sollicité le transfert de ces marques à son profit, au motif que ces dépôts avaient été réalisés par la société NDE en fraude de ses droits.

𝗟𝗲 𝘁𝗿𝗶𝗯𝘂𝗻𝗮𝗹 𝗮𝗱𝗺𝗲𝘁 𝗹𝗲 𝗰𝗮𝗿𝗮𝗰𝘁𝗲̀𝗿𝗲 𝗳𝗿𝗮𝘂𝗱𝘂𝗹𝗲𝘂𝘅 𝗱𝗲𝘀 𝗱𝗲́𝗽𝗼̂𝘁𝘀 𝗰𝗼𝗻𝘁𝗲𝘀𝘁𝗲́𝘀 :

➡️ Il est établi que la société NDE était le distributeur français des produits de la société BAGI qui les commercialisait déjà ailleurs sous les marques « BAGUI » et « SHUMANIT ». Le choix des noms et le design des étiquettes des produits provenaient de la société BAGI. Les signes « BAGUI » et « SHUMANIT » étaient donc essentiels à l’activité de cette dernière.

➡️ Lors du dépôt des marques, la société NDE savait que les signes « BAGUI » et « SHUMANIT » étaient ceux de son fournisseur, qu’ils soient connus ou non.

➡️ Ainsi, déposant sciemment à titre de marque ces signes nécessaires à l’activité de son fournisseur, la société NDE s’est indûment réservée, pour la France, l’exclusivité définitive de la distribution, à tout le moins le contrôle de l’usage de ces signes.

➡️ Si à la date des dépôts, la société NDE avait souhaité sécuriser les droits des deux parties et non uniquement ses propres intérêts, elle aurait dû effectuer les dépôts au nom de la société BAGI, plutôt qu’en son nom propre.

➡️ Enfin, la démarche de la société NDE visant à assigner la société ELDAI démontre que ces dépôts avaient pour but d’assurer frauduleusement une exclusivité sur les signes, en empêchant la société BAGI de choisir un autre distributeur.

Les marques ont été transférées de manière rétroactive à la société BAGI et la saisie-contrefaçon, réalisée à l’origine par la société NDE, annulée.

𝗦’𝗮𝗴𝗶𝘀𝘀𝗮𝗻𝘁 𝗱𝗲𝘀 𝗱𝗲𝗺𝗮𝗻𝗱𝗲𝘀 𝗲𝗻 𝗰𝗼𝗻𝗰𝘂𝗿𝗿𝗲𝗻𝗰𝗲 𝗱𝗲́𝗹𝗼𝘆𝗮𝗹𝗲 𝗲𝘁 𝗽𝗮𝗿𝗮𝘀𝗶𝘁𝗮𝗶𝗿𝗲, 𝗲𝗹𝗹𝗲𝘀 𝘀𝗼𝗻𝘁 𝗲́𝗴𝗮𝗹𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁 𝗿𝗲𝗷𝗲𝘁𝗲́𝗲𝘀 :

➡️ La société NDE n’est ni à l’origine des produits distribués, ni de leur étiquette. Les griefs invoqués ne reposent en définitive que sur l’existence d’une distribution concurrente de mêmes produits fournis par le même fournisseur, ce que rien n’interdit.