USAGE DE LA MARQUE SOUS UNE FORME MODIFIEE

L’exploitation du seul dessin du cactus stylisé suffit à justifier l’usage de la marque complexe

CJUE, n°C-501/15 P, Cactus SA contre EUIPO, 11 octobre 2017

Dans une décision rendue le 11 octobre 2017, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) approuve l’analyse effectuée par le Tribunal de l’Union européenne (TUE) : l’utilisation du seul élément figuratif de la marque antérieure, à savoir le cactus stylisé, sans l’élément verbal « Cactus », équivaut à une utilisation « sous une forme qui diffère par des éléments n’altérant pas le caractère distinctif de la marque dans la forme sous laquelle celle-ci a été enregistrée » (art. 15, 1.a. Règlement 207/2009 à l’époque visé dans l’arrêt).

Dans cette affaire, la chaîne de magasins luxembourgeoise CACTUS avait formé opposition devant l’EUIPO à la demande d’enregistrement de la marque communautaire « CACTUS OF PEACE CACTUS DE LA PAZ » sur le fondement, notamment, de sa marque semi-figurative CACTUS.

Cette opposition avait été rejetée par la Chambre de Recours au motif que l’opposante, qui ne justifiait que de l’usage du cactus stylisé, ne rapportait pas la preuve de l’usage sérieux de sa marque complexe.

La décision fut annulée par le TUE, puis portée devant la CJUE.

Cette dernière était donc tenue de rechercher si l’usage du cactus stylisé, seul, pouvait s’apparenter à un usage modifié n’altérant pas le caractère distinctif de la marque enregistrée.

La Cour valide l’analyse du Tribunal : selon une appréciation globale effectuée entre les signes, elle considère que l’élément verbal « Cactus » et le cactus figuratif sont globalement équivalents puisqu’ils traduisent, chacun dans sa forme propre, le même contenu sémantique et ne présentent pas un caractère distinctif distinct. Ceci signifie, en d’autres termes, que l’élément verbal ne présente pas un caractère distinctif plus dominant que l’élément figuratif.

Compte tenu de cette équivalence conceptuelle, la Cour admet que l’absence de l’élément verbal n’est pas suffisamment importante dans la perception de cette marque, dans son ensemble, pour en altérer son caractère distinctif.

Cette solution n’est pas sans surprendre. On aurait pu s’attendre en effet à ce qu’il soit jugé qu’en l’absence d’usage du signe verbal, généralement considéré comme l’élément le plus important dans une marque complexe puisqu’il se lit et se voit immédiatement, la marque complexe ne devait pas être considérée comme faisant l’objet d’un usage sérieux et encourrait par conséquent la déchéance.

Cette décision, évidemment favorable au titulaire du droit – elle lui permet de ‘sauver’ sa marque de la déchéance – a une portée qui nous semble néanmoins relative.

La solution ainsi dégagée suppose, pour pouvoir s’appliquer en d’autres cas, que le dessin exploité soit des plus fidèle à la version graphique du mot qu’il désigne. Elle impose en outre que l’élément figuratif ne puisse être nommé que par un terme unique, à l’exclusion de tout autre et qu’il ait la même traduction dans plusieurs langues si l’on est en présence d’une marque européenne. A défaut, l’équivalence conceptuelle entre l’élément verbal et le figuratif ne pourrait pas être caractérisée.